"Plus j'y réfléchis plus je sens qu'il n'y a rien de plus réellement artistique que d'aimer les gens." Vincent Van Gogh
Paris Décembre 1928 | La Coupole : Concert de Gina Gaufrette.
Par la gauche de la scène on vit bientôt apparaitre un piano droit tout noir monté sur roulettes, il était poussé par une très jeune femme vêtue d'une longue robe noire nouée à la taille par un large ruban en boucle d'un rouge sombre.
Son visage était d'une pâleur d'un blanc de porcelaine. Elle avait de longs cheveux aussi noirs que sa robe et qui descendaient jusqu'au bas de son dos et je ne pus m'empêcher de dire à Tenebræ combien j'étais surpris par la ressemblance de cette jeune femme avec Elle.
Et Tenebræ, sans bouger son visage penché tendrement sur mon épaule me répondit d'une voix émue et toute douce :
- "C'est Verna... c'est ma fille"
- "Votre fille ?!?!... Ici ?!?
- "Mais nous sommes revenus tous les trois en 1928 ! Aussi comment cela est-il possible ?!?! Ainsi donc Tenebræ Vous avez une fille ?!?!?"
Je n'en revenais pas ! Et je ne pus que constater l'invraisemblable ressemblance qu'il y avait entre Tenebræ et cette jeune personne qui, sur la scène, assise maintenant au piano, discutait en ce moment même avec Gina Gaufrette et le regard de Verna était si perçant que je me demandais si ses yeux n'étaient pas tout simplement des diamants tant ils brillaient parfois avec des éclats d'une fulgurance tout à fait étrange !
Gina Gaufrette revint alors sur le devant de la scène pour chanter "Le Goût du Jour" mais avant cela :
- Mademoiselle Verna Accipiter Nisus qui termine actuellement ses études au Conservatoire a bien voulu venir ce soir m'accompagner. Je la remercie d'autant plus que c'est une chanson toute neuve : à la fois pour elle comme pour moi.
Aussi mes amis, vous tous ici, ayez la petite indulgence qu'il faut en pareil cas.
Aussi pour la remercier je vais lui demander de bien vouloir nous jouer une de ses compositions :
et Gina Gaufrette se tourna, toute souriante vers sa pianiste qui commença à jouer.
Comme Verna tournait le dos à Gina Gaufrette, on ne voyait plus que ses longs cheveux de jais mais ce furent ses mains qui attirèrent bien vite mon attention : elles étaient si anguleuses au dessus du clavier qu'elles me faisaient penser à des serres d'oiseau de proie.
Comparaison qui était encore accentuée par le jeu pianistique de Verna pour son Prélude si tendu et saccadé et les mouvements secs et vifs de son visage faisaient soudain voler ses longs cheveux comme les ailes d'un rapace tournoyant au dessus d'un pic enneigé.
Mais sans que rien ne puisse le laisser prévoir son Prélude se termina par le début d'une suite à "Cephei" à laquelle elle travaillait et ce début baignait dans une plénitude et une légèreté si exquise que ce n'était plus à des serres que les mains de Verna me faisaient penser mais aux seules ailes envolées d'un papillon.
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